Le plus ancien livre consacré à la prestidigitation fut écrit par un Toulousain nommé Jean PREVOST et publié en 1584 sous le titre : « La Première partie des subtiles et plaisantes inventions, contenant plusieurs jeux de récréation et traits de souplesse, par le discours desquels les impostures des bateleurs sont découvertes ».
Y figure un tour « Pour rompre par grand merveille un bâton reposant sur deux verres sans les casser ni les fendre ».
Je n’ai pu consulter ce livre. En revanche, en 1977, parut sous la plume du professeur Robert TOCQUET (1898-1993) « La prestidigitation à la portée de tous » (Editions Productions de Paris-N.O.E.) où se trouve révélée la manière d’exécuter ce tour. La voici :
« LE BATON ROMPU.
Effet de l’expérience. Vous enfoncez à chaque extrémité d’un manche à balai et selon son axe un clou long et mince. Vous placez ensuite deux verres pleins d’eau sur deux chaises se faisant vis-à-vis à distance convenable, et, par l’intermédiaire des clous, vous posez le manche à balai sur le bord des deux verres. Puis, armé d’un bâton de bois dur et assez gros (de 3 cm au moins de diamètre et de 90 cm environ de longueur), vous donnez un coup vigoureux sur le milieu du manche à balai qui se rompt sans que les verres soient dérangés.
L’expérience est encore plus saisissante en faisant soutenir le manche à balai au moyen de deux anneaux de papier ou de carton tenus chacun par un aide entre le pouce et l’index. Les anneaux restent intacts après le choc.
Enfin, on peut, comme le faisait le grand illusionniste Cartis, compliquer le tour en posant les deux anneaux sur le tranchant de deux lames de rasoir maintenues l’une et l’autre par deux assistants. Ici encore, les deux anneaux ne sont pas déchirés. Curtis employait même deux anneaux de papier de soie. D’autre part, le manche à balai peut être avantageeusement remplacé par des barres de store en sapin.
Explication de l’expérience. Il s’agit en l’occurence d’un effet d’inertie, la masse du manche à balai absorbant le choc de sorte que celui-ci n’est pas transmis aux supports. »
J’avoue ne pas avoir encore tenté l’expérience (pour conserver mon balai !) mais que je tiendrai au courant les lecteurs dès la réussite ou l’échec de l’opération…
Article rédigé par Laurent Bastard. Merci
Ce tour est déjà décrit par Rabelais dans « Pantagruel » en 1532, donc avant le livre de Jean PREVOST (1584), au chapitre XXVII. En voici le texte, légèrement modernisé :
« En cette même heure Panurge prit deux verres qui là étaient tous deux d’une même grandeur, et les emplit d’eau tant qu’ils en purent tenir, et en mis l’un sur une escabelle et l’autre sur une autre, les éloignant à part par la distance de cinq pieds.
Puis il prit le fût d’une javeline de la grandeur de cinq pieds et demi et le mit dessus les deux verres, en sorte que les deux bouts du fût touchaient justement les bords des verres.
Cela fait, il prit un gros pieu et dit à Pantagruel et aux autres :
« Messieurs, considérez comment nous aurons facilement la victoire sur nos ennemis ; car, – de même que je romprai ce fût ici dessus les verres sans que les verres soient en rien rompus ni brisés, et plus encore, sans qu’une seule goutte d’eau en sorte dehors – de même nous romprons la tête à nos Dipsodes, sans que nul de nous soit blessé et sans perte aucune de nos affaires.
Mais, afin que vous ne pensiez qu’il y ait enchantement, tenez, dit-il à Eusthenes, frappez de ce pieu tant que vous pourrez au milieu. »
Ce que fit Eusthenes, et le fût se rompit en deux pièces tout net, sans qu’une goutte d’eau tombât des verres. »
Ci-dessous le site sur lequel est accessible le livre de Jean PREVOST et publié en 1584 sous le titre : « La Première partie des subtiles et plaisantes inventions, contenant plusieurs jeux de récréation et traits de souplesse, par le discours desquels les impostures des bateleurs sont découvertes ». 212 pages
https://archive.org/details/8Y4098INV7462RES/mode/2up