Cette petite image pour enfants, en chromolithographie, éditée par la chocolaterie parisienne Guérin-Boutron au début du XXe siècle, nous montre ce qu’était le « jeu de la cruche ». Au verso, il est ainsi décrit : « Parmi les jeux de village, le jour de la fête patronale, le jeu de la cruche est en vogue. Une cruche en poterie est placée en terre, les joueurs, les yeux bandés et armés d’un bâton, doivent partir d’une certaine distance et marcher droit au but, de façon à briser la cruche d’un seul coup. »
Ce jeu portait des noms différents selon les régions. Ainsi, à Chazelles-sur-Lyon (Loire), était-il appelé le « jeu de la carafe ». Dans un article sur « Les fêtes balladoires de Chazelles au 19e siècle » (sur le site www.forez-info.com), Henri Séon explique que lors de la fête du 15 août, les habitants pratiquaient le « jeu de la carafe, rue Grange-Maçon, une rue minuscule et étroite de l’ancien quartier ouvrier de Chazelles. Ce même jeu est appelé aussi jeu de la cruche, jeu des biches ou des bertes, en parler régional. C’est un pot suspendu par une ficelle en travers de la rue et qu’il faut casser avec un bâton, les yeux bandés. Evidemment, le pot n’est pas immobile et on ignore ce qu’il contient, de l’eau, de la farine ou… un canard vivant joliment enrubanné. »
Ce jeu était (ou est encore) pratiqué dans diverses régions. Ainsi, en Périgord, est-il appelé « cassa-topina ». On peut en voir une photo contemporaine dans le livre de Serge Maury, Michel Combet et alii : « Dordogne, Périgord », Editions Christine Bonneton, 2007, p. 161 (voir sur Google.books). On remarquera que ce sont des pots de fleurs et non plus des cruches qui sont accrochés à une corde tendue sur toute la largeur de la rue.
Le jeu de la cruche s’appelait d’ailleurs le « casse-pot » autrefois, puisque Rabelais le mentionne dans la liste de ceux que pratique le petit Gargantua (voir l’article Les jeux de bâton du petit Gargantua).
Une variante moins dangereuse (des éclats de poterie peuvent blesser le joueur), pratiquée par les scouts ou les parents qui accueillent des enfants, consiste à accrocher à des fils des ballons emplis d’eau qu’il faut percer avec un pique-feu.
Ajoutons enfin que le jeu de la cruche n’est pas seulement français mais semble répandu de par le monde. Le site cambodgien de l’association Krousar Thmey (aide à l’enfance défavorisée) www.krousar-thmey.org, dans un article publié à l’occasion de sa dernière fête à Kampong Cham en 2010, nous indique que le jeu de la cruche cassée se déroule avec des participants aux yeux bandés qui brisent une cruche suspendue, remplie de farine, à l’aide d’un bâton (voir la photo en page 4).
Enfin, signalons que ce nom désigne aussi un jeu où le bâton n’intervient pas. Dans la Grèce antique, il consistait à lancer des cailloux plats dans une amphore. Il était aussi connu des Romains. Il s’est pratiqué en France, en Angleterre et dans d’autres pays d’Europe, en lançant des palets dans un tonneau. Il est devenu ensuite le « jeu de la grenouille ».
Article rédigé par Laurent Bastard. Merci.
Bonjour,
Merci pour votre article.
J’ai mis quelques photos de ce « Jeu de la Cruche » sur Wikimedia Commons à la page : « Category:Jeu de la Cruche à Lainsecq » (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Jeu_de_la_Cruche_%C3%A0_Lainsecq)