Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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PEN-BAZ CONTRE FUSILS A SAINT-MEEN EN 1902


On aurait tort de ranger le pen-baz breton (voir l’article Le peunbaz et le bâton du tad-koz et autres articles sur le pen-baz) comme un vestige folklorique des bâtons de combat de l’Ancien Régime. Au début du XXe siècle il fut encore utilisé lors des violentes échauffourées qui se produisirent dans le Finistère, dans le Léon et notamment à Saint-Méen. Voici en quelles circonstances.

La loi du 1er juillet 1901 sur les associations interdisit les congrégations religieuses et ne leur permit plus d’enseigner. L’expulsion des congrégations suscita des troubles un peu partout en France, mais surtout en Bretagne.

Le 29 juillet 1902 environ 500 habitants de Saint-Méen gardaient la maison des Soeurs du Saint-Esprit, qui devait être fermée selon la loi. Des violences furent commises à l’encontre d’un instituteur laïc qui voulut pénétrer dans l’école. Il dut quitter la commune avec sa femme et son enfant pour se réfugier à Saint-Renan, d’où il fut aussitôt rejeté par des paysans armés de bâtons ferrés et de fourches. D’autres incidents suivirent à Saint-Méen et alentour.

Les 17 et 18 août l’expulsion des sœurs est alors organisée manu militari par les autorités. 200 hommes se rassemblent alors devant le calvaire, armés de leur pen-baz et conduits par l’abbé Gayraud, qui était député du Finistère mais hostile à la loi de 1901. Les femmes portent aussi des bâtons et des branches d’ajonc aux redoutables piquants.

Une barricade est construite sur la rue qui conduit à l’établissement des sœurs. Le 18 août, à 11 h, les gendarmes et les soldats du bataillon colonial essaient d’enlever la barricade mais sont repoussés à coups de pen-baz. L’armée va à nouveau charger et ses effectifs sont plus importants que les habitants. La presse suit l’évolution des évènements.

A. JANNE, journaliste à La Croix relate ce qui suit dans le « Bulletin des congrégations » : « Par une sorte de coquetterie, ils tiennent leur pen-bas comme pour faire le salut des armes. (…) L’abbé Gayraud (…) et deux autres prêtres les conjurent de ne pas verser le sang. Ceux-ci, farouches, ne répondent pas. L’abbé Gayraud insiste : Jetez vos bâtons ! Personne ne bouge. Enfin il trouve des accents qui vont jusqu’aux cœurs. La plupart jettent leurs bâtons et se croisent les bras, plus fiers, plus farouches encore. »

La charge est donnée, une violente bagarre s’ensuit et la barricade finit par être enlevée. Ensuite les militaires ouvrent de force les portes de la congrégation et les combats reprennent contre les habitants groupés autour des sœurs. Elles sont finalement expulsées.

La rentrée des classes de septembre 1902 fut tendue. Il fut difficile de trouver des instituteurs civils pour remplacer les Sœurs du Saint-Esprit.

Les pen-baz avaient cédé contre les fusils (volontairement non chargés, il faut le préciser, mais leur crosse fut employée pour disperser les habitants).

Trois des illustrations de cet article sont extraites de « Le Monde illustré » du 23 août 1902 (qui consacra presque tout son numéro aux évènements de Saint-Méen) et une de « La Croix illustrée » n° 89 du 7 septembre 1902, dont la couverture était légendée : « Les expulsions en Bretagne. Les barricades de Saint-Méen forcées le 18 août par l’infanterie coloniale ».

Article rédigé par Laurent Bastard, merci :)

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2 Comments to “PEN-BAZ CONTRE FUSILS A SAINT-MEEN EN 1902”

  1. mouazan dit :

    bravo pour votre article
    j’ai une carte postale qui illustre la garde des bretons aux portes de st méen
    kenavo

  2. [...] Les Bretons passent pour être parfois susceptibles, surtout lorsqu’ils estiment qu’on se mêle de ce qui les regarde. On l’a vu avec l’article Pen-baz contre fusils à Saint-Méen en 1902. [...]

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