Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
Bibliothèque de ressources historiques, culturelles, artistiques, litteraires, sportives…sur la canne et le bâton, en France et dans le monde…
LA CANNE DU VIEILLARD LUBRIQUE, PAR ROSNY AINE (1913)

Joseph-Henry ROSNY aîné (1856-1940) fut un écrivain dont les romans d’anticipation en ont fait l’un des tout premiers maîtres de la science-fiction. D’autres oeuvres ont pour cadre la préhistoire (« La Guerre du feu » a été adapté par J.-J. Annaud).
Mais il écrivit aussi des romans naturalistes, complétement et injustement oubliés. Dans l’un d’eux, intitulé « Dans les rues ; roman de moeurs apaches et bourgeoises », publié en 1913 chez Charpentier, Rosny décrit le destin des trois enfants d’une veuve, Mme Lérande, qui luttent contre la misère. L’aîné s’en sort par le travail et l’obéissance, le cadet tourne mal et devient un « apache » et Jeanne, la petite dernière, prend conscience de son pouvoir de séduction auprès des hommes et des ressources financières qui pourront s’ensuivre.
Elle a à peine quinze ans lorsqu’elle est remarquée par une entremetteuse qui lui conseille de se rapprocher d’un vieillard attiré par les adolescentes…

Le talent de l’écrivain est de suggérer, de façon allusive, le réveil de la sexualité du vieil homme à la vue de Jeanne, par l’agitation de sa canne. Voici les extraits de la scène :
« Dehors, Jeanne marchait à petits pas. Un vieillard attendait, au coin de la rue du Loing. Sa canne d’ébène tremblottait ; il avait des yeux extraordinairement agrandis par le retrait des paupières qui s’aplatissaient comme des yeux de cabillaud. Une des joues, en se contractant, relevait le coin gauche de la bouche ; la physionomie décelait une impressionnabilité convulsive. Ce vieillard portait des bottines vernies et sa cravate montrait une grosse perle, en forme d’oeuf.
Quand il vit Jeanne, sa canne trembla davantage, sa face marqua une exaltation démente. Elle lui jeta un regard vague et passa. Lui, tourné vers cette jeune silhouette, avait l’aspect effrayant des vieux hommes passionnés et sans force. »
Plus loin, Rosny nous fait assister à la rencontre de Jeanne et du vieillard : « Le lendemain, Jeanne arriva en retard, au cimetière de Montrouge. Le vieillard y était. (…) Quand il vit venir la jeune Lérande, sa canne eut un tremblement. »

La canne est un attribut de la virilité dont témoigne un vocabulaire métaphorique et argotique bien connu (bâton, gaule, trique, verge, baguette, gourdin, etc.). C’est pour cette raison qu’à la fin du XIXe siècle des hommes s’indignaient de ce que les femmes portent des cannes (voir l’article : Les femmes voleuses de cannes).

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

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