Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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LA CANNE ELECTRIQUE
Categories: Bâton scientifique

En 1746, le professeur hollandais Pieter van Musschenbroek, de Leyde, découvrit les propriétés du condensateur électrique en fabriquant ce qui fut appelé la « bouteille de Leyde ». Le principe de cet appareil composé d’un récipent en verre, de feuilles d’étain froissé à l’intérieur et d’une enveloppe extérieure métallique, ainsi que d’une électrode, repose sur le fait que les charges électriques s’accumulent sur les surfaces séparées par le verre.
Cette découverte et cet appareil connurent un très grand succès au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Il devint même un objet d’attraction foraine, chacun voulant éprouver la décharge électrique provoquée par cet appareil. On l’appelait aussi la « bouteille d’Ingenhouz ».
A partir de là, certains imaginèrent de fabriquer des « cannes électriques »…

Arthur MANGIN, dans le « Musée des Familles » de 1859 (p. 215), a consacré un article à l’Histoire de l’électricité, où il décrit ces étranges cannes :
« On fit aussi des cannes électriques, qui n’étaient autre chose que de véritables bouteilles de Leyde, dissimulées sous l’apparence fallacieuse de cannes ordinaires, à pomme d’or, d’argent ou de chrysocale (alliage doré). Il y en avait pour toutes les bourses.
La canne électrique consistait en un tube de verre enveloppé d’une feuille de métal peinte en couleur de bois, et rempli d’une substance conductrice de l’électricité (par exemple des feuilles d’étain chiffonnées), au milieu de laquelle plongeait une tige métallique, terminée extérieurement par une boule qui servait de pomme à la canne.
Celle-ci étant électrisée, comme la bouteille d’Ingenhouz, au moyen du ruban verni et de la peau de chat ou de lièvre, on la présentait traîtreusement, sous un prétexte quelconque, à une personne sans défiance, qui, en la touchant, recevait le choc électrique.
On conviendra que les esprits mal faits et animés d’un zèle bien tiède pour le progrès des sciences pouvaient seuls se fâcher de cette plaisanterie, qui pourtant faillit un jour avoir des suites funestes.
Un gentilhomme électromane, le chevalier de Versac, se promenait aux environs de la place Royale, armé d’une canne électrique qu’il venait d’acheter avec l’intention bien arrêtée d’en faire l’essai sur la première personne de sa connaissance qui s’offrirait à lui. Mais le malheur voulut qu’aucun de ses amis ne se trouvât sur son passage.
Le chevalier, décidé à ne point rentrer chez lui sans avoir fait usage de son appareil, avisa un particulier qui marchait paisiblement à quelques pas devant lui : c’était un capitaine aux gardes, nommé La Chenardière. Versac le connaissait à peine de vue.
- N’importe ! se dit-il ; voici mon homme. Tant pis s’il prend mal la chose !
Il s’arrête, tire de sa poche la peau de chat et le morceau de soie vernie, charge son arme, court après l’officier, et, sans préambule, touche de la pomme de sa canne la main que celui-ci tenait justement derrière son dos, à l’instar du grand Frédéric.
- Aïe ! s’écrie La Chenardière, peste soit le manant !
Et, tout en proférant cette apostrophe, il se retourne et, d’un coup de sa vraie canne de jonc, il fait voler en éclats l’arme fragile de son agresseur.
Il n’en fallait pas davantage pour qu’une querelle sérieuse s’engageât. Quelques instants après, les deux gentilshommes ferraillaient sur le quai, derrière l’Arsenal, en présence de témoins rencontrés au hasard chemin faisant.
Heureusement ils en furent quittes, La Chenardière pour une égratignure à la joue, et Versac pour un coup de pointe qui l’obligea de porter huit jours le bras droit en écharpe. »

Un autre auteur précise que « lorsque ces cannes sont chargées, on peut sans danger les tenir par le milieu, comme on tient une bouteille électrisée par la panse ; mais si l’on approche la main de la pomme de la canne, l’effet produit est le même que quand on touche le bouchon d’une bouteille de Leyde ; on reçoit la commotion et l’étincelle. »

Question habituelle aux lecteurs : quelqu’un sait-il si des cannes électriques ont été conservées dans des collections publiques ou privées, et si l’on en connaît des gravures ou des photos ?

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci.

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