Arnauld d’ABBADIE est l’auteur de souvenirs publiés en 1868 sous le titre : « Douze ans dans la Haute-Ethiopie (Abyssinie) ». Ce livre est consultable dans son intégralité sur google.books mais nous en extrayons un passage qui nous renseigne sur un jeu de cannes pratiqué à cheval. Il n’est pas sans nous rappeler celui du djerrid (voir l’ article : Le jeu du djerrid chez les cavaliers persans) ou celui, analogue, pratiqué par les Serviens (Le jeu de bâton des cavaliers serbes).

« Le jour suivant, à pareille heure, le Ras (prince) assista au jeu des cannes. Environ six cents cavaliers, partagés en deux camps, se chargeaient à fond de train, s’évitaient, se poursuivaient, rusaient et évoluaient de toutes manières, tantôt individuellement, tantôt par escouades, tantôt en masse, et se lançaient en guise de javelines, de longues verges ou même de lourds bâtons. Ils esquivaient et se dérobaient par voltes, virevoltes et caracoles ; ils s’interpelaient, se provoquaient et poussaient des cris pour applaudir aux coups heureux ; les boucliers résonnaient sous les projectiles ; les chevaux secondaient souvent leurs maîtres par l’intelligence de leurs mouvements, et malgré la fièvre du jeu, les accidents étaient rares, me dit-on. J’y vis plusieurs chevaux et cavaliers remarquables ; le Ras montait bien, mais sans grâce ; en revanche, il lançait la canne à des distances considérables. »
Ce type de jeu de lancer de canne semble avoir été très répandu de l’Iran à la Turquie, dans l’ancienne Espagne maure, en Europe du sud-est sous domination turque, en Afrique du Nord et en Afrique de l’Est. Nous en donnerons d’autres exemples.

Article proposé par Laurent Bastard. Merci