Le poète polonais Adam MICKIEWICZ, analysant un poème médiéval lors de son cours sur les Slaves, professé au collège de France en 1840-1841 et publié en 1849, rapporte un épisode de l’une des dernières invasions tartares en Occident au XIIIe siècle.
On y découvre l’usage divinatoire que faisaient d’un bâton brisé les sorciers de l’empereur Koubilaï.
« La fille de Koubilaï, roi des Tartares (connu par les mémoires de Marco Polo), ayant entendu parler des merveilles de l’Occident, voulut voir l’Europe. Elle part, se dirige vers l’Allemagne. Les Allemands, séduits par sa beauté et ses richesses, l’attaquent dans une forêt, la dépouillent et la tuent. Son père, pour la venger, se met à la tête de toute l’Asie, envahit la Russie et la Pologne et menace l’Allemagne. (…) Bientôt les deux armées se trouvent en présence (probablement à la bataille de Lignitz).
Les Tartares passaient chez les Slaves pour sorciers ; ce qui explique cette réputation, c’est qu’ils se servaient de la poudre et lançaient des fusées.
(…) Koubilaï appela tous les sorciers et les devins de son armée, leur ordonna de consulter les présages et de prédire l’issue du combat.
Alors les sorciers et les devins s’assemblent, se partagent en deux camps, entre lesquels on plante un bâton noir. Les sorciers coupent en deux ce bâton, donnant à l’un des morceaux le nom de Koubilaï et à l’autre le nom du chef des chrétiens ; puis dès qu’ils ont prononcé certaines paroles magiques, les deux bâtons commencent un combat qui finit par la victoire du bâton Koubilaï. En effet, les chrétiens furent vaincus. »
Article rédigé par Laurent Bastard. Merci
L’issue d’un conflit prédit par des bâtons figurant les armées en présence se retrouve très loin de l’Asie des Tartares. En effet les Maoris usaient de ce procédé, selon le Père SERVANT, dans sa « Notice sur la Nouvelle-Zélande » (1841) publiée dans les Annales de la propagation de la foi, Lyon (1843), p. 21 :
« On emploie encore un autre moyen de prévoir l’issue d’une campagne : un jeune homme prend un nombre de baguettes égal à celui des tribus belligérantes, il aplanit un certain espace de terrain, y plante les baguettes comme des quilles en deux lignes parallèles représentant les deux armées en présence, et s’éloigne un peu en attendant l’effet que produira le vent. Si les baguettes qui représentent l’ennemi tombent en arrière, l’ennemi sera culbuté ; si c’est en avant, il sera vainqueur ; si c’est obliquement, la victoire demeurera incertaine. »