Les ruses des voleurs sont innombrables, parfois à l’aide d’un bâton, mais pas toujours couronnées de succès. Voici ce que rapporte la Gazette des tribunaux de l’an IV (1795), n° X, tome XIII, p. 289 (consultable via Google.livres).

« TRIBUNAL CORRECTIONNEL DU DEPARTEMENT DE LA SEINE.
Vol d’un objet exposé sur la voie publique.

Le 8 floréal an 3, Cornelière et Barrier paraissaient au palais Egalité. Celui-ci, armé d’un bâton, et placé dans le jardin, à côté de la grille qui sépare de la galerie l’arcade neuve, s’amuse à agacer un chien. Celui-là, étant sous l’arcade, en face de la boutique de Berrichon, chapelier, n° 140.

Ce chapelier avait exposé des chapeaux sur les pointes de la grille. Cornelière va trouver Barrier, lui parle et revient sous l’arcade. Barrier continue à agiter son bâton, et enlève avec ce bâton deux des chapeaux, qui tombent dans la galerie. Cornelière en saisit un à poil, de forme ronde, et l’emporte.

Attentifs à tout ce qui se passe, deux enfants en préviennent des citoyens qu’ils rencontrent : « arrêtez, disent-ils, ce jeune homme. Il vient de voler un chapeau. » Ces citoyens voient le chapeau à la main de celui qu’on leur indique. Ils avancent. Cornelière double le pas. Effrayé, il jette le chapeau dans une boutique. On l’arrête. On arrête aussi Barrier.

Devant le commissaire de police et devant le directeur du jury, Barrier et Cornelière affirment qu’ils ne se connaissent pas l’un l’autre. Barrier convient qu’il avait un bâton, qu’il l’a jeté en l’air, mais ce bâton n’a point frappé les chapeaux qui étaient sur la grille. Cornelière ne lui a point parlé. Il ne sait si Cornelière a ramassé et emporté le chapeau.

Cornelière déclare qu’il a trouvé ce chapeau au pied d’une grille. Qu’il ignore si c’était devant la boutique d’un chapelier. Qu’il ne s’est pas aperçu que le bâton de Barrier eût entraîné la chute de ce chapeau. Cornelière ajoute qu’il n’avait point intention de le voler. S’il l’a jeté dans une boutique, c’est qu’il a cru devoir s’en débarrasser quand il a entendu crier au voleur. »

Ces déclarations ne convainquent pas le tribunal qui déclare coupables de vol les deux individus. Et la peine est sévère :
« Le tribunal, après avoir entendu le substitut de l’accusateur public, condamne Cornelière et barrier à la peine de la détention chacun pendant quatre années (…) et à l’exposition préalable pendant six heures. »

Bigre ! Quatre ans de prison pour un vol de chapeau ! C’est ce qu’on appelle un fameux retour de bâton !

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci