Le bâton permet d’exprimer la pensée ou le désir d’un homme lorsqu’il trace sur le sol une ligne, des figures, des mots. Avec un bâton, Euclide enseignait à ses disciples en traçant ses figures géométriques sur le sable d’une plage. Les enfants, faute de craie, savent dessiner une marelle en grattant la terre avec un bâton. Les signes de piste des scouts peuvent aussi être faits de la même façon. Les rituels magiques évoquent le tracé d’un cercle au bâton pour se protéger des influences maléfiques.
Le tracé au sol est la forme de communication la plus primitive. Le stylo est un bâton, la feuille de papier, la terre ou le sable. Tracer avec un bâton manifeste une volonté de communiquer dans l’immédiat et incite celui à qui l’on s’adresse à exercer sa mémoire. D’un geste de la main, d’un frottement du pied, le mot, le signe, la figure retournent au néant, le vent balaye les tracés sur le sable, la mer les recouvre, comme pour signifier que rien n’est éternel sur terre. Et cela s’avère aussi utile pour ne pas laisser de traces discernables par ses ennemis.
L’illustration est inspirée d’une aquarelle de Géricault évoquant l’un des tragiques épisodes qui ont suivi le naufrage de la Méduse en 1816. Les survivants avaient atteint la côte ouest de l’Afrique. Deux d’entre eux, Rogery et Kunner, prisonniers des Maures, sont conduits devant leur souverain. « Le roi Zaïde ordonna à M. Kunner de lui raconter les évènements politiques de l’Europe et de la France depuis la Révolution ; et comme M. Kunner ne comprenait pas bien son désir, le roi fit tracer sur le sable, par son premier ministre, la carte de l’Europe, de la Méditerranée et des côtes d’Afrique. »
(Gravure extraite du Magasin pittoresque n° 51 de décembre 1859).
Article rédigé par Laurent Bastard. Merci