Il y a des personnages qui sont indissociablement attachés à un bâton. On ne les imaginerait pas sans ce soutien : les vagabonds, mendiants et autres chemineaux, les pèlerins, les compagnons du tour de France, les excursionnistes et promeneurs, et en général tous ceux qui marchent.

En voici un exemple, tiré du recueil de poèmes d’Eugène BIZEAU : « Croquis de la Rue », publié en 1933 aux Editions de la Fenêtre ouverte à Issy-les-Moulineaux. Eugène BIZEAU fut un poète anarchiste, né et mort à Véretz (Indre-et-Loire), à cent trois ans (1883-1889).

Ce recueil, que notre ami Patrick FONTENEAU a eu la gentillesse de nous offrir, est illustré de beaux bois gravés par G. DELATOUSCHE.
Le livre s’ouvre par « Le vagabond », que voici.

« LE VAGABOND

Vieillard qui vit en sage et de peu se contente,
Par les sentiers brûlants ou les chemins boueux,
Il va, les doigts crispés sur le bâton noueux
Qui cadence ici-bas sa démarche hésitante.

Il a dressé partout les piquets de sa tente
Et senti l’aquilon hérisser ses cheveux :
Il a souffert, gémi, sangloté comme ceux
Pour lesquels du bonheur s’éternise l’attente.

En vain, jetant sur lui l’anathème et l’outrage,
Les valets du bourreau, gênés par son courage,
Assouviront des grands l’implacable rancœur :

Jusqu’au jour où la mort touchera son front blême,
Cet homme aura goûté la volupté suprême
D’être resté fidèle au rêve de son cœur. »

Un grand merci à Patrick FONTENEAU.
Article rédigé par Laurent Bastard, merci