La canne peut être détournée de sa fonction et devenir un fusil entre les pattes d’un chien : c’est ce que raconte plaisamment l’écrivain Paul de KOCK (1793-1871), dans son roman « Un bon enfant » (1833).
A la fin d’un dîner où s’ennuient les convives, on sonne à la porte : c’est monsieur Clinelle, « un vieux monsieur, bien long et bien maigre, qui se présente à la société, accompagné d’un gros carlin qui aboie si fort qu’on n’entend pas les compliments de son maître. » Les hôtes cachent à peine leur dépit de voir venir un raseur qui va aggraver la monotonie du dîner. D’autant plus que monsieur Clinelle est persuadé qu’il amuse la société en faisant faire des tours à son chien, dont celui du vieux grenadier :
« Oh ! madame, vous allez voir celui-ci faire l’exercice comme un vieux grenadier… Il est extraordinaire… Allons, Médor, debout… et que l’on tienne son fusil !…
C’est le vieux rotin de M. Clinelle qui représente le fusil ; et le carlin, après s’être adossé au mur, se tient en effet sur ses pattes de derrière, et garde la canne avec celles de devant. Le maître de l’animal, qui croit que la compagnie ne peut pas se lasser d’admirer la belle pose de Médor, se tient à côté de son chien, le bras levé, ayant l’air de le menacer, afin que le chien ne bouge pas.
Il y a au moins trois minutes que cela dure. Boudinette, qui en a assez, s’avance vers madame Darvillé en lui criant : -Est-ce que nous ne ferons pas la petite partie d’écarté ce soir ? – Pardonnez-moi… on va dresser la table.
M. Clinelle, fort mécontent qu’on parle de jouer aux cartes, quand on peut voir son carlin en faction, laisse retomber son bras, et aussitôt Médor lâche la canne et va se fourrer sous un canapé, probablement pour qu’on ne lui fasse plus faire l’exercice. »
Les romans de Paul de Kock ont connu un grand succès de leur temps. L’auteur était prolifique. Il a aussi écrit des chansons et des pièces de théâtre. Il mettait en scène des gens modestes, avec sympathie et humour. Il est aujourd’hui oublié mais l’une de ses chansons a connu un succès posthume : « Madame Arthur », écrite en 1850 et mise en musique par Yvette Guilbert vers 1890, et que l’on fredonne encore.
Article rédigé par Laurent Bastard. Merci
…petit additif musical ici avec accent svp !