Dans son livre « Immortelle randonnée ; Compostelle malgré moi » (2013), Jean-Christophe RUFFIN nous raconte le pèlerinage qu’il accomplit à Saint-Jacques de Compostelle en partant de la frontière franco-espagnole et en suivant le Chemin du Nord.

Il est y davantage question du sac à dos du marcheur, qui devient sa charge, sa maison, tout son bien, allégé en cours de route des objets inutiles comme un dépouillement spirituel. Mais l’autre accessoire du marcheur, le bâton, est assez peu évoqué. Cependant un passage du chapitre « Sur les bacs de Cantabrie » nous en fait découvrir un, qui est aussi insolite que son possesseur.

J.-C. Ruffin rencontre un jour un pèlerin « vêtu d’une façon tout à fait ordinaire : jean, blouson imperméable style années 1960, chaussures de ville. On aurait dit qu’il était descendu de chez lui pour acheter des cigarettes au coin de la rue. (…) Le seul objet qui dénotait, dans cette apparence lisse, était le bâton. Vu de près, il s’avérait qu’il ne s’agissait pas d’un bourdon, encore moins d’une canne télescopique comme la plupart de nous en portait ; c’était un simple piquet de champ. Il était en bois brut, mal équarri et sa pointe avait été taillée grossièrement à la hache et enduite de goudron. La curiosité était trop forte et je finis par lui demander ce qu’il faisait avec ça.
6J’ai été attaqué par des chiens. Il m’a fallu courir et le seul objet que j’ai trouvé pour me défendre, c’est ce piquet.
Depuis, il l’avait simplement conservé et s’apprêtait à circuler dans une grande ville avec, à la main, cet instrument digne de Cro-Magnon.
Ainsi, dans la personne de cet étrange pèlerin, la peur ancestrale des chiens avait-elle ajouté à une froideur très XXIe siècle ce réjouissant accessoire revenu du Néolithique. »

Plusieurs articles ont été consacrés sur ce site aux différents bâtons de pèlerins (saisir « pèlerin » dans le moteur de recherche). Voir notamment : Le bâton ou bourdon de pèlerin.

Article rédigé par Laurent Bastard, merci