Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
Bibliothèque de ressources historiques, culturelles, artistiques, litteraires, sportives…sur la canne et le bâton, en France et dans le monde…
LA MASSE DU MASSIER ET DU HERAUT

Il s’agit là d’une masse un peu différente des masses d’armes employées lors des combats médiévaux, et qui souvent se terminaient par une sphère ou une forme quadrangulaire losangée, pourvues de pointes.
Celle qui nous intéresse est plus pacifique, davantage un objet d’apparat, quoique pouvant servir au maintien de l’ordre. Leurs porteurs se nommaient « massiers ».

Alfred FRANKLIN, dans son « Dictionnaire historique des arts, métiers et professions exercées dans Paris depuis le XIIIe siècle » (1905-1906), définit ainsi les MASSIERS : « Appariteurs, huissiers, etc. qui précédaient, porteurs d’une masse, le roi, le chancelier, les cours souveraines, le recteur de l’Université. On les nommait aussi « porte-masse », « sergents à masse », « sergents du roi », « sergents d’armes », etc. On trouve aussi « maissiers ».
Il renvoie aussi à « Bedeaux », et cette entrée nous fournit des détails intéressants sur le type de masse portée par ces derniers.

« BEDEAUX. Officiers subalternes de l’Université. Ils étaient au nombre de quatorze, deux pour chaque Faculté et pour chaque Nation. On les divisait en grands et en petits bedeaux. Le premier bedeau de la Nation de France était dit « grand bedeau de France ».
Leurs fonctions consistaient à proclamer les congés, les jours et les heures des leçons, à publier les décisions des Facultés et des Nations et à en assurer l’exécution matérielle ; enfin à précéder avec leur masse le recteur, le doyen ou le procureur dans les grandes cérémonies.

« La masse était un bâton à lourde tête d’argent. En 1448, le grand bedeau de la Faculté de médecine portait une masse d’argent et le petit bedeau une masse de bois. Le doyen, écrit Hazon, « exposa que cela n’étoit point honorable pour la Faculté. Chaque docteur s’imposa de seize sous parisis, et en 1455 on remit au petit bedeau une verge surmontée d’une masse d’argent, qui étoit estimée soixante écus d’or. » (Eloge historique de la Faculté de médecine, p. 25). (…)

« Les bedeaux attachés aux églises y remplissaient les mêmes fonctions qu’aujourd’hui. Ils étaient vêtus d’une longue robe de drap rouge ou bleue, et portaient sur la manche gauche une plaque d’argent ou un chiffre brodé représentant l’image ou le nom du patron à qui l’église était dédiée. Ils avaient à la main une verge de baleine garnie d’ornements en argent. Le « Dictionnaire de Trévoux » nous apprend qu’on les nommait « chasse-coquins » et « chasse-chiens », parce qu’ils avaient « soin de chasser les mendians des églises et les chiens. »

L’une des illustrations du présent article nous montre un détail de la statue de François Rabelais, à Chinon (Indre-et-Loire). Réalisée en 1880 par le sculpteur parisien Emile HEBERT mais installée en 1882 sur les quais de la Vienne, elle comporte, sur le piédestal, diverses scènes associant Rabelais à ses prédécesseurs antiques Gallien et Hippocrate. A gauche, le massier de la Faculté de médecine porte sa masse sur l’épaule.

L’autre image est l’une de la série « Costumes de Paris à travers les siècles » (1850). Elle nous montre le « massier du Parlement (XIVe siècle) ».

Enfin, sachons que les Anglais, qui ont conservé jusqu’à nos jours de vieilles cérémonies et d’antiques fonctions, ont toujours des massiers. Paul MORAND, dans son livre « Londres » (1933), écrit, p. 251 : « Debout sur les ressorts, se tiennent les laquais à perruque, le jonc à la main, les massiers servant à pied, portent la masse en cristal et la portent droit, privilège unique. » (cité sur le site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, le CNRTL).

La dernière illustration est extraite du magazine « Lectures pour tous » de février 1910. Elle figure dans un article intitulé « A l’assaut de la chambre des Lords » et est légendée : « Le héraut de la chambre des Lords portant sur l’épaule sa masse d’or. » Sa fonction est ainsi décrite et se rapporte à l’ouverture solennelle du Parlement :

« La première cérémonie sera l’entrée solennelle du « Speaker » ou Président de la Chambre des Communes, le plus puissant personnage du royaume après le souverain. (…)
« Hats off ! Speaker ! (Otez vos chapeaux ! Le Président !) ». La foule obéit au commandement et se range respectueusement de chaque côté du vestibule. Le cortège s’avance, précédé d’un policeman, d’un secrétaire en grande tenue et d’un héraut d’armes portant sur l’épaule une lourde masse d’or. (…) Après avoir échangé par trois fois des révérences avec les membres présents, le Speaker et le chapelain vont se poster au bout de la grande table qui occupe le centre de la salle, et sous laquelle le héraut dépose sa masse. (…) Cependant, les membres ont pris sur le coussin de leur siège une petite feuille de carton où est imprimée une prière que le chapelain va réciter à haute voix. A son geste, ils se retournent tous vers la muraille, en baissant le front ; l’instant précis où la prière est terminée et le mot amen est prononcé, est celui où la session est ouverte. Alors le héraut vient reprendre sa masse, qu’il pose sur la table (…).
« Autre cérémonie curieuse qui a lieu après le départ du chapelain. Un coup frappé à la porte attire le héraut d’armes, qui s’en vient ouvrir un judas et demander qui ose ainsi troubler la Maison : « A message from the King ! » répond une voix. Et la porte qui s’ouvre à nouveau livre accès à un personnage vêtu d’un splendide uniforme : c’est « Black Rod », le fameux « Black Rod » (baguette noire), l’officiel mandataire du souverain auprès du Parlement, le haut fonctionnaire rétribué par le « privy-purse » (cassette royale).
« Il s’incline profondément par trois fois, se plante noblement près de la table, et donne lecture du message par lequel le Roi invite ses fidèles Communes à se rendre à la Chambre des Lords pour y entendre son discours. Puis il se retire lentement à reculons, en s’inclinant par trois fois. Précédé de son héraut portant la masse, et suivi par les députés, le Speaker se rend alors solennellement à la Chambre des Lords, écoute le discours que lit le Chancelier, et revient dans le même apparat. »

Article rédigé par Laurent Bastard, merci :)

Tags:

1 Comment to “LA MASSE DU MASSIER ET DU HERAUT”

  1. [...] avons évoqué récemment La masse du massier et du héraut. Peu après la rédaction de cet article nous avons découvert la photo ci-jointe dans le magazine [...]

Leave a Reply