Juliette CUVILLIER-FLEURY, épouse de l’écrivain et académicien du même nom, publia au milieu du XIXe siècle des nouvelles et des critiques d’œuvres théâtrales et artistiques.
En 1864, dans « La Semaine des enfants » du 27 janvier, elle donna à ses lecteurs une historiette à but moral intitulée « La fête de la Saint-Jean ; la cigale et la fourmi ».
Elle y conte les aventures de deux petits villageois qui s’en vont à la foire de la St-Jean ; l’un, Jean, est économe et raisonnable, l’autre, Pierre, est insouciant et dépensier. Il gagne une oie à la loterie et s’en va ensuite devant la baraque des merveilles présentées par un polichinelle porteur d’une canne :

« En ce moment, un affreux polichinelle qui se démenait sur un tréteau attira son attention.
« Bonjour messieurs et mesdames, criait-il de toute la force de ses poumons. Vous êtes laids et bêtes ! vous m’ennuyez, moi qui suit si beau et si aimable ; regardez mon joli nez et quel buste !… Le premier qui entrera ici je lui ferai avaler cette canne sans la mâcher ! »
Et il frappait de sa baguette un grand tableau représentant au milieu d’un paysage vert pomme un serpent boa, un jeune crocodile à trente-deux dents sans compter les dents de sagesse, et enfin une demoiselle à barbe de capucin et pesant trois cents kilos. Polichinelle criait :
« Je vous défends d’entrer là pour voir toutes ces merveilles au prix de quinze centimes, trois sous ! »
- Eh bien ! j’en donne cinq et je n’ai pas peur », s’écria le courageux Pierre entraîné par l’admiration.
Le polichinelle s’arrêta étonné, mais il livra bien vite passage à l’aventureux et prodigue enfant. »

La scène a été illustrée par BERTALL (de son vrai nom Charles Constant Albert Nicolas d’ARNOUX de LIMOGES SAINT-SAENS !), célèbre dessinateur et graveur (1820-1882), qui illustra des magazines (Le Magasin pittoresque, le Musée des familles, la Semaine des Enfants) et de nombreuses œuvres littéraires (Balzac, Alexandre Dumas, Paul Féval, etc.).
Nous avons légèrement recadré la gravure sur l’enfant et Polichinelle qui tient sa canne.

Article rédigé par Laurent Bastard, merci