Le « Journal des voyages » rapporte, dans son numéro du 22 septembre 1907, de quelle façon se déroulaient les duels entre les gauchos de la pampa chilienne. L’arme en était un couteau spécial appelé « corvo » et les accessoires de protection une baguette et une couverture enroulée autour d’un bras.
« Bien rare est le vrai chilien du peuple qui n’a pas toujours sur lui dans une gaine un « corvo », corbeau. C’est un grand couteau recourbé en bec de corbeau, ou une petite serpe, si l’on préfère. Dans les mains exercées du peuple, le corvo est une arme redoutable. Le corvo vous étripe l’homme pris au dépourvu en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire. Si bien que police et juges traitent celui qui a joué traitreusement du corvo sur le pied d’un véritable assassin. Fort heureusement le Chilien met une sorte de chevalerie rustique à régler avec des formes ses haines intimes. Lorsqu’il en est ainsi, des témoins sont constitués, ils essayent de concilier, et, s’ils n’y réussissent pas, règlent les conditions du duel, comme dans nos mœurs. La seule différence porte sur le choix des armes. Bien que régulier, le duel n’en est pas moins un duel à coups de couteau ou de corvo, mais à coups de couteau donnés selon les règles. Pour qu’elles soient observées, un ou deux experts, je ne dirai pas maîtres d’armes, mais maîtres du couteau, président à ces duels. Ils sont armés d’une baguette ou d’un bâton à l’aide desquels ils n’hésitent pas, dans la limite du possible, à faire dévier les mauvais coups, ceux surtout qui pourraient entraîner mort d’homme. »
L’auteur de ces lignes, Emile Barbier, semble dire que la baguette ou le bâton sont tenus par les experts, mais sur les deux photos de l’article, ici jointes, on voit, sur l’une, les deux longs couteaux croisés, tandis que sur l’autre, les duellistes tiennent chacun deux objets : s’agit-il de deux couteaux, ou d’un couteau et d’un bâton ? Le personnage de gauche, qui est sans doute l’expert, porte bien un bâton à sa ceinture, sur son dos. La mauvaise qualité des photos ne permet pas d’être plus précis.
Article rédigé par Laurent Bastard, Merci