Le passage de la canne végétale à la canne animale a été franchi il y a bien longtemps. Les éleveurs, les bouchers, les abatteurs qui allaient ou revenaient d’une transaction commerciale les poches pleines tenaient en main un solide nerf de boeuf pour parrer toute agression.
Long de trente à cinquante centimètres et d’un diamètre variant d’un demi à un centimètre, il est composés de nerfs tressés et sechés. Cela donne lieu à une matraque dure et flexible.
D’où viennent ces nerfs ? Henri Béjoint de l’Université de Lyon 2 nous indique qu’il ne faut sans doute pas se fier aux dictionnaires :
« Je ne résiste pas ici au plaisir de citer l’exemple de nerf de bœuf, dont j’ignore d’ailleurs s’il serait confirmé par les acteurs principaux, puisque je n’en ai eu connaissance que par un document publicitaire publié par Hachette. L’histoire est la suivante. Un nerf de bœuf est, ou plutôt était, une sorte de matraque jaunâtre, légèrement souple, d’une trentaine de centimètres de long, et d’environ un centimètre et demi de circonférence qu’utilisaient naguère les policiers français dans certaines opérations de maintien de l’ordre. Le Dictionnaire de l’Académie, depuis sa première édition (1694) jusqu’à l’édition de 1838, définissait le terme comme « le membre génital du bœuf, arraché et desseiché (sic)… », mais cette définition fut ensuite modifiée en « tendon de la jambe et du calcanéum … » (1838), puis en « partie épaisse du ligament cervical … » (1932-35). Cette dernière version fut ensuite copiée par tous les dictionnaires du xxe siècle, jusqu’au jour où les lexicographes de chez Hachette « redécouvrirent » la définition plus ancienne et affirmèrent, à tort ou à raison, qu’on avait caché la réalité aux Français pendant un siècle et demi : il s’agissait bel et bien d’une autre partie de l’anatomie du bœuf, qui présentait l’énorme avantage de ne pas avoir beaucoup servi. Bel exemple de confiance aveugle des lexicographes dans leurs prédécesseurs, qui les pousse à reprendre sans réfléchir ce qu’ils trouvent dans les dictionnaires existants, confiance peut-être alimentée dans ce cas précis par le souci de ne pas écrire quoi que ce soit qui puisse choquer la pudeur. »
A noter que cette matraque a été utilisé aussi comme fouet ou cravache en punition des esclaves ou encore dans les camps de concentration.
On peut encore trouver ces nerfs de boeufs à la fois dans les rayons d’aliments pour chiens ou encore en demandant à son boucher et en les tressant et sechant soi-même. Sinon, ils sont sur les brocantes à environ 100-150€.
Cet article a été rédigé par Grégoire Prudhon. Merci Greg
Très bon article, qui fait voir la réalité des choses au commun des mortels, en effet, pour des fins commerciales, nombre de produits sont labelisés sous une origine inexacte afin de ne pas offusquer l’acheteur potentiel, ça a existé de tout temps.
en revanche, il est fortement probable que le soit-disant « nerf » soi en fait un tendon, comme en boucherie on désigne (de amnière erronée)par « nerf » toute partie fibreuse rencontrée dans la viande, y compris les tendons.
Vu les dimensions de l’arme une fois séchée, il ne peut s’agir d’un nerf véritable au sens biologique.
Excellent !
Alors, après une petite recherche sur Gallica, j’ai trouvé un traité de physiologie de 1906-1909 qui mentionne qu’on fabrique bien le nerf de boeuf avec le ligament cervical. Du coup, cela sème encore davantage le doute sur l’origine exacte du nerf de boeuf. hehehe
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6211778n/f368.image.r=%22nerf%20de%20boeuf%22?rk=85837;2