Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
Bibliothèque de ressources historiques, culturelles, artistiques, litteraires, sportives…sur la canne et le bâton, en France et dans le monde…
LE VOLEUR MARUTSE TRAHI PAR SON BATON (1875)

De 1872 à 1879, le Dr Emile HOLUB parcourut les différentes régions d’Afrique du sud. Il relata ses explorations dans son livre « Sieben Jahre in Süd-Afrika » (Sept ans dans l’Afrique australe), paru en 2 volumes à Vienne en 1881. Ces récits furent traduits et publiés durant le 2e semestre 1883 dans « Le Tour du Monde, nouveau journal des voyages ». C’est de ce périodique qu’est issu ce qui suit.

En 1875, accompagné d’un Anglais nommé Blockley, le Dr Holub arriva sur le territoire des Marutsés placés sous l’autorité du roi Sépopo.
Le roi, vêt à l’occidentale, reçut ses hôtes de la façon la plus avenante mais un incident se produisit dans la nuit, où intervient un bâton…

« Du 20 au 21 (septembre), il se passa un incident qui troubla quelque peu l’entente entre le monarque et moi. Par suite de la munificence de l’ami Blockley, on ripailla fort dans la petite cour de notre logis ; il était bien près de minuit quand ces messieurs et ces dames au teint noir, tous de belle humeur, eurent achevé de vider leurs trois énormes pots de bière. A la fin, n’en pouvant plus à la fois de fatigue et de libations, la société s’endormit ; mais alors ce fut le tour des calebasses-épinettes à me tenir en éveil par leurs résonances.

La répétition des mêmes ritournelles réussit toutefois à m’endormir. hélas ! ce ne fut pas pour longtemps. Des aboiements de chien me firent soudain tressauter, et, en ouvrant les yeux, je crus remarquer une lueur inaccoutumée dans ma hutte, dont j’avais cependant barricadé l’ouverture avec une caisse. Tout à coup, dans la baie de la porte, haute de deux pieds et demi environ, je distinguai une forme noire : c’était un indigène qui se disposait à appréhender de sa dextre mes vêtements déposés à côté de moi sur un coffre. Quelques zagaies suspendues à mon chevet, et que je m’étais procurées, étaient les seules armes à ma portée ; avant que j’eusse eu le temps de lever le bras, mon voleur avait disparu. Je m’élançai à ses trousses ; mais le drôle, qui était accompagné d’un complice, jeta un bâton et un poisson qu’il tenait, et s’éclipsa entre les huttes.
Cette aventure fut cause que je ne pus fermer l’oeil le reste de la nuit. Au matin, j’en informai le roi, qui me répondit évasivement, et je m’aperçus que, ce jour-là, il paraissait assez peu charmé de ma présence.

J’insistai néanmoins pour qu’il tirât l’affaire au clair, et, usant de ruse, j’envoyai un des domestiques de Blockley faire savoir aux gens de la ville que j’avais trouvé un bâton près de la rivière et que j’étais prêt à acheter cet objet à son propriétaire ; je donnai en même temps la description du bâton, et j’attendis curieusement pour voir si l’appât des fausses perles que je promettais de donner en échange inviterait le voleur à se démasquer.

L’après-midi se présenta un bonhomme qui, à la vue du bâton, se jeta dessus en le réclamant comme sien. Comme il reconnut également le poisson pour sa propriété, je n’hésitai pas à le conduire au roi, qui était justement en train de souper. Mais le délinquant avait avec lui un de ses amis, qui s’empressa de courir à sa hutte cacher le corps du délit, de sorte que, lorsque les envoyés de Sepopo se présentèrent chez lui, on ne trouva rien, et l’homme fut déclaré innocent. Comme je ne me satisfis point de cet arrêt, le roi résolut, pour m’être agréable, de punir le voleur ; et comme je lui demandais quel châtiment il comptait lui infliger, il me répondit qu’il allait le faire mettre à mort. Cette fois encore, force me fut de protester ; je priai le monarque de relâcher l’homme, tout en ajoutant que désormais je tuerais net quiconque s’introduirait chez moi nuitamment : sur quoi, le roi déclara que c’était ce qu’il y avait de mieux à faire, et en informa immédiatement à haute voix la foule assemblée. »

Article rédigé par Laurent Bastard, merci :)

Tags:

Leave a Reply