On pourrait penser qu’il s’agit d’un élément de lit à baldaquin, d’un lit à colonnes, mais non : il s’agit d’un instrument bien particulier dont l’usage s’est perdu.
Le site du Trésor de la langue française informatisé comporte une entrée extrêmement fournie à « baston », d’où nous extrayons ces informations :
« Bâton long servant à battre le lit et à en étirer les draps. » (1330-1332). Baston long a faire lit (1448-1449). Baston de lit : « barre de bois recouverte d’étoffe servant à tenir raide la housse du lit » (1498). « Bâton utilisé pour tendre les draps et régulariser les plis des couvertures et courtepointes » (1669).
Mais encore ? Pascal DIBIE, dans « Ethnologie de la chambre à coucher » (Grasset et Fasquelle, 1987 et Métaillé, 2000), p. 73, indique que, compte tenu des grandes dimensions de certains lits au Moyen Age (12 pieds sur 11, soit 4 m sur 3,50 m), « les servantes utilisaient pour tendre les draps et la courtepointe un bâton spécial, dit « bâton de lit ». Soit. Mais comment s’en servait-on ?
Pas de réponse claire non plus par Michelle PERROT, dans son « Histoire de chambres » (Le Seuil, 2009), p. 58, lorsqu’elle évoque la promiscuité des lits communs à toute la famille et les lits clos des campagnes : « Laisser voir le lit défait est impudique. Les femmes veillent à l’aplatir en refoulant les couvertures avec un grand bâton, le « bâton de lit ».
On ne sait plus trop si le mot désigne un bâton à plusieurs usages : battre le lit ? étirer les draps ? tenir raide la housse du lit ? refouler les couvertures ?
C’est dans un livre sympathique et plein de détails sur la vie passée, signé SAINT-FROMOND et intitulé « La Vallée de l’Argentor, Barnabé » (Ed. Les 12 Ours, 2010) qu’on découvre le passage suivant (p. 22) qui répond en partie à nos questions. Il s’agit de l’évocation des souvenirs d’enfance d’un habitant de la vallée de l’Argentor, affluent de la Charente, dans le département du même nom. On peut situer les faits durant l’entre-deux-guerres.
« D’abord, il faut changer les draps et les serviettes de la salle d’eau. Ca, c’est mon travail à moi, sauf pour remettre les draps propres parce que je n’y arrive pas tout seul. Des fois, quand Grand-mère est énervée, elle dit que je ne vais pas assez vite et qu’elle y arriverait mieux toute seule avec son bâton de lit. Moi, j’ai essayé le bâton de lit mais c’est drôlement dur. Grand-mère, elle y arrive du premier coup. Elle borde le drap au pied du lit, elle se met sur le côté et elle pose le haut du drap sur le bâton. Là, elle fait un grand mouvement au-dessus du lit avec son bâton, comme si avec son bâton elle avait un bras tellement long qu’il irait jusqu’à l’autre côté du lit. Et le drap se met en place comme il faut, sans un pli. Elle refait pareil avec les couvertures et elle jette l’édredon par-dessus. »
Comme toujours, il faudrait le voir « en vrai » pour se rendre compte des gestes accomplis, de même que de la longueur du bâton (la largeur du lit ?). Ce qui est probable, c’est que l’usage de ce bâton se justifie lorsque l’un des côtés du lit est placé le long d’un mur. Il est alors difficile, sans déplacer le meuble, d’étendre draps et couverture sur le matelas, et le bâton devient alors un prolongement du bras (mais il ne peut pourtant pas border la literie du côté du mur)
Le bâton de lit désignait aussi… une personne. Le Trésor de la langue française informatisé nous apprend en effet qu’au sens métaphorique, les termes « un bon bâton à défaire un lit » signifiaient une « femme belle et de bonne taille » (1640). Et le Supplément au Dictionnaire de l’Académie française, par F. RAYMOND (1835) indique : « BATON. On dit proverbialement d’une belle, grande et grosse fille, que c’est un bon bâton pour défaire un lit. »
On remarquera que dans les citations précédentes, le bâton en question servait à faire un lit, tandis que la « belle et grosse fille » sert à « défaire un lit ». Faire et défaire, c’est toujours travailler, dira-t-on, mais il y a des chances, avec ce bâton-là, que le lit entier soit à refaire après usage…
Article rédigé par Laurent Bastard, merci
je possède un bâton ou canne de lit
elle me viens de mes grand parents en Auvergne (j’ai 61 ans) mais elle appartenais peut être déjà à mes arrières grand parents.
elle mesure 87,5cm au total de sa longueur et pèse
415 grammes.
le « pommeau » en forme de patte de cheval forme un L pour tirer les draps les couettes ou les édredons. il mesure 7.5 cm de longueur et 7 cm de largeur, il est en métal qui me parait être du fer.
suit une bague blanche (matière?) de 5 mm.
le corps canne ou bâton mesure 74 cm.
de couleur marron, de souplesse d’un « nerf de bœuf », dont je ne puis en déterminer la matière devait servir à taper les couettes ou les édredons.
suit une autre bague blanche de 5mm également.
la pointe,de 5 cm, également en fer devait servir à pousser les draps couettes…
j’ai essayer de m’en servir étant enfant sur des lits haut et contre le mur ,oui pas simple.
je n’ai jamais vu faire mes grand parents.
en espérant vous avoir aidé dans vos recherches
cordialement
Merci à J. Théotine pour la précision de sa description, qui nous permet d’imaginer aussi nettement que possible son bâton de lit, qui ressemble à une canne. Pourrait-on d’ailleurs s’y tromper et rencontrer des bâtons de lit chez des marchands qui les vendraient sans le savoir pour des cannes ? Car l’objet décrit est plus qu’un simple bâton, puisqu’il est muni d’accessoires (« pommeau », bagues, pointe) qui pourraient prêter à confusion.