C’est une histoire de canne qui débute sous Napoléon Ier. En guerre contre l’Angleterre, il décréta à Berlin, en 1806, que tout commerce était interdit avec la perfide Albion. Des navires américains, transportant des marchandises anglaises et qui les débarquaient dans les ports des zones impériales, furent saisis et leurs biens vendus au profit du Trésor. Il en résulta un préjudice considérable pour les Etats-Unis, qui n’étaient pourtant en guerre avec aucune de ces puissances.
A la chute de l’Empire, les Américains demandèrent réparation et le litige traîna en longueur. Les négociations reprirent sous Louis-Philippe et finalement, le gouvernement français accepta de verser aux Etats-Unis la somme énorme de 25 millions de francs. Cependant, les députés tiquèrent, d’autant plus qu’à l’ouverture du congrès, en 1834, le président Andrew Jackson (1767-1845) laissa entendre que des représailles étaient envisageables si la France ne cédait pas. Un député, le général Valazé, déposa un amendement subordonnant tout versement aux excuses au président américain.
Il en résulta une scène qui fit la une des journaux d’outre-atlantique, et qui fut rapportée dans la « Revue des deux mondes » en 1835. La canne du président en était la vedette :
« Les américains ont beaucoup ri de l’amendement Valazé, et les marchands de bois de campêche et d’acajou ont trouvé fort singulier que la France osât réclamer des excuses pour les menaces du président.
Le général Jackson est entré dans une colère toute patriotique, en apprenant les prétentions de notre chambre des députés ; il a sauté aussitôt sur son bambou de Pensylvanie, et le brandissant d’un bras vigoureux, avec l’agilité d’un bâtoniste normand, il menaçait de sa canne républicaine le représentant de notre jeune monarchie, qui, heureusement pour lui, se trouve à dix-huit cents lieues du bout de bâton.
Cette petite anecdote a fourni l’idée d’une caricature qui a fait pâmer d’aise tous les amis d’outre-mer de M. de Lafayette, et qui a été vendue en moins de huit jours à dix mille exemplaires, à New-York, à Boston, à Philadelphie et à Washington, tant les américains sont touchés des procédés du cabinet des Tuileries envers eux.
Ce singulier dessin (…) est intitulé « Les Excuses » (The Apology). La composition en est simple et lucide, deux figures en forment tout le sujet : l’une, arrogante et brutale, regarde avec indignation, et le bâton à la main, un homme bardé de cordons et de crachats, couvert de broderies et de larges épaulettes, qui a l’air de demander merci au bâton républicain, d’un air timide et suppliant. L’homme au bâton, c’est le général Jackson, on le dit d’une ressemblance parfaite ; il tient serré dans sa main gauche le sac qui contient les vingt-cinq millions qu’on lui accorde si bénévolement ; à travers ses bésicles on découvre la colère de son regard et il s’écrie : Vous avez bien fait de payer, ou par l’Eternel !!! (It’s well that you paid it, or by the Eternal !!!). L’autre se confond en politesses, les excuses de Jackson le touchant au dernier point, et il s’empresse de s’écrier : Pas un mot de plus, mon cher général, vos excuses sont suffisantes (not autherword, my dear general, you apology is all sufficient). »
Un lecteur connaît-il cette gravure du président Jackson avec son bâton devant le roi Louis-Philippe apeuré, et pourrait-il l’adresser au blog pour que nous la reproduisions ? Merci.
Article rédigé par Laurent Bastard. Merci
[...] en furent les victimes. Outre-atlantique, nous avons évoqué ceux de Jackson (voir l’article Le président Jackson brandit le bâton contre la France (1835) et du sénateur Brooks (Les coups de canne du sénateur américain [...]